Une Journée Régionale consacrée aux expériences bretonnes de la Télésanté.


Les Assises de la Télémédecine sont à l'esprit de nombreux professionnels de santé bretons investis dans les pratiques de télésanté.

Lors de la Journée Régionale organisée par le Groupement Régional e-santé Bretagne, à laquelle le Think Tank Télésanté et Numérique en Santé était convié comme expert du sujet, les témoignages du terrain sont venus enrichir le thème de la téléconsultation assistée ou accompagnée d'un professionnel de santé, dont l'ARS Bretagne et l'Assurance maladie d'Ille et Vilaine ont la mission de finaliser des propositions pour lever certains freins à l'usage.  L'Atelier final réunissant tous les groupes de travail se tiendra le 14 octobre 2025 à Rennes. 

En marge de la Journée Régionale de Télésanté, le groupe de travail des professionnels de ville s'est réuni. Nous rapportons ici quelques témoignages du terrain qui nous paraissent être de nature à faire évoluer cette nouvelle pratique.


Distinguer la téléconsultation "ponctuelle" assistée pour une affection aiguë bénigne de celle programmée par le médecin traitant dans un parcours de soins alternant des téléconsultations et des consultations chez un patient atteint d'une maladie chronique. (https://telemedaction.org/les-objectifs-des-assises/1-res-preconisations)


Téléconsultation assistée ponctuelle pour une affection aiguë bénigne

Il s'agit dans 85% des cas d'adultes jeunes (moins de 40 ans) ou d'enfants qui habitent en zone urbaine. Les Société de téléconsultation (STC) réalisent en 2024 la moitié des 13,5 millions de téléconsultations remboursées par l'Assurance maladie.


Une téléconsultation ponctuelle assistée en officine ou en mairie sur une borne ou dans une télécabine. (https://telemedaction.org/422016875/450893471)(https://telemedaction.org/423570493/telemedecine-81)

Dans les Côtes d'Armor, un pharmacien accompagne les patients pour qu'ils utilisent au mieux la borne installée dans l'Officine. Il s'agit essentiellement d'un accompagnement à l'usage de la borne. Le temps d'accompagnement est variable en fonction de l'acculturation de l'usager ou du patient au numérique en santé. Chez une personne âgée, en situation d'illectronisme ou de troubles cognitifs débutant, l'accompagnement est plus long. La rémunération du pharmacien par l'Assurance maladie pour l'assistance est de 5 euros. Elle est payée à partir de 5 assistances à minima, la limite supérieure étant de 750 euros/an. (https://telemedaction.org/les-objectifs-des-assises/webinaire-du-19-d-cembre-2024)

Une aide-soignante, rémunérée 10h par semaine par la Mairie, accompagne les patients qui veulent une téléconsultation ponctuelle dans la télécabine louée par la mairie pour améliorer l'accès aux soins. Il s'agit là encore d'un accompagnement à l'usage de la télécabine et de ses objets connectés.


Une téléconsultation ponctuelle assistée d'un infirmier(e) libéral(e) (IDEL) au cabinet ou au domicile du patient

Cette forme de téléconsultation ponctuelle se caractérise par l'accompagnement du patient lors de son échange avec un médecin avec l'usage d'objets connectés pour compléter l'examen clinique virtuel (indicateurs verbaux et non-verbaux).

La téléconsultation ponctuelle assistée peut être organisée par l'IDEL. Elle est cependant complexe et chronophage en l'absence de tiers technologique. Le temps consacré à l'organisation et à l'accompagnement peut aller de 20-30 mn (en cabinet) à 45 mn (au domicile). La rémunération actuelle (12 euros) est insuffisante pour maintenir un revenu horaire comparable à une activité sans télésanté (50 à 60 euros/heure). L'insuffisance de financement est aujourd'hui évidente et la rémunération d'une assistance par IDEL devrait être de 25 à 35 euros pour maintenir le niveau de revenu horaire d'une IDEL.


Autres formes d'organisation de téléconsultation ponctuelle assistée.(https://telemedaction.org/422016875/t-l-consultation-assist-e)

Les organisations territoriales coordonnées (OTC) dont certaines réalisent des téléconsultations ponctuelles (OTT) Elles sont référencées par l'Assurance maladie et améliorent l'accès aux soins dans les zones en sous-densité médicale. (https://www.agevillage.com/media/library/images/Liste-organisations-territoriales-de-sant%C3%A9-2022.pdf)

Une quarantaine de sites a obtenu ce label. Le premier accès au soin dans ces zones en sous-densité médicale (ZIP), est l'IDEL en cabinet ou le pharmacien en officine. Le recueil de données cliniques par le professionnel non-médical, voire  l'examen clinique infirmier, permet au médecin de permanence sur une plateforme régionale de juger la pertinence ou non de réaliser la téléconsultation assistée par le professionnel de santé.(https://omedys.fr/le-modele)

L'unité mobile de télémédecine dépêchée par le médecin régulateur du Centre 15 permet de réaliser une téléconsultation ponctuelle assistée d'une infirmière hospitalière. Cette organisation, à l'initiative du médecin régulateur du SAMU, consiste à envoyer une IDE hospitalière au domicile d'un patient qui a appelé le centre 15 pour une urgence ressentie. Une téléconsultation ponctuelle assistée de l'IDE hospitalière est réalisée avec le médecin régulateur qui juge de la nécessité ou non d'une hospitalisation ou d'une venue dans le service des urgences. (https://www.urml-normandie.org/22549-lunite-mobile-de-telemedecine-un-nouveau-vecteur-pour-la-telemedecine-dans-la-manche/).

L'unité mobile de téléconsultation organisée par l'ARS (Franche Comté, Hauts de France) avec la collaboration d'ambulanciers de sociétés privées (ex. Jussieu). 


Toute téléconsultation ponctuelle auprès d'un médecin qui ne connaît pas le patient doit générer un compte rendu de cette téléconsultation, lequel sera versé dans le DMP de Mon Espace Santé (MES). Le corollaire serait que tout usager qui sollicite une téléconsultation ponctuelle, assistée ou non, devrait autoriser le médecin télé consultant à accéder à son DMP pour consulter la synthèse de son profil médical. 


Téléconsultation programmée assistée pour une affection chronique

La moitié des 13,5 millions de téléconsultations remboursées par l'Assurance maladie en 2024 étaient réalisées à l'initiative d'un médecin généraliste ou d'un médecin psychiatre.

La forme de téléconsultation programmée à l'initiative du médecin traitant se distingue de la téléconsultation ponctuelle pour affection aiguë bénigne avec un médecin qui ne connaît pas le patient. Le patient chronique ne devrait jamais réaliser de téléconsultation ponctuelle avec un médecin qui ne le connaît pas, notamment pour un simple renouvellement d'ordonnance.

Cependant, dans le contexte actuel où certains  patients se retrouvent sans médecin traitant lorsque le précédent est parti en retraite, le médecin de la STC, s'il a accès à la synthèse du profil médical du patient chronique dans MES, (voir ci-dessus) peut effectuer le renouvellement d'ordonnance. Le compte-rendu de téléconsultation sera déposé dans le DMP de MES. Il faut également rappeler que lorsque l'ordonnance renouvelable est expirée chez un patient chronique, le pharmacien peut continuer à distribuer les médicaments pendant une période de 3 mois

Plusieurs formes de téléconsultation programmée par un médecin et assistée d'un professionnel paramédical peuvent être distinguées.


La téléconsultation programmée et alternée avec la consultation en présentiel dans le cadre d'un parcours de soin hybride coordonné par le médecin traitant.

La téléconsultation programmée chez un patient âgé de 65 ans et plus, présentant des polypathologies, en situation d'illectronisme, de vulnérabilité, d'handicap de mobilité, devrait toujours être assistée ou accompagnée d'un professionnel de santé.

La téléconsultation programmée chez un enfant handicapé (moteur et/ou mental) est assistée par l'IDE de l'établissement. (https://telemedaction.org/les-objectifs-des-assises/webinaire-du-5-juin-2025)


La téléconsultation programmée et assistée auprès d'un professionnel médical spécialiste (notamment les 5 spécialités "hors parcours")

Ces téléconsultations spécialisés programmées sont réalisées soit sur des plateformes de STC, soit sur des plateformes de rendez-vous médical, voire avec un logiciel de téléconsultation, le médecin spécialiste envoyant le lien de connexion au patient après l'avoir rencontré en présentiel.

La téléconsultation programmée en ophtalmologie, assistée d'un orthoptiste ou d'un opticien qui organise cette téléconsultation avec le médecin ophtalmologiste. (https://telemedaction.org/les-objectifs-des-assises/etat-des-lieux-de-la-t-l-ophtalmologie)((https://telemedaction.org/445927157/450646742)

La téléconsultation programmée en gynécologie-obstétrique, réalisée surtout par des sage-femmes, qui peut être non accompagnée chez des patientes jeunes comme dans le suivi des grossesses normales ou l'accompagnement de la contraception chez les jeunes filles, ou la téléconsultation programmée et assistée d'un(e) infirmier(e) chez des femmes plus.âgées.(https://telemedaction.org/445927157/446821228)

La téléconsultation programmée en santé mentale, réalisée par des psychiatres ou des psychologues cliniciennes. Elles sont généralement simples et organisées par des tiers technologiques (STC, plateformes de rendez-vous). Les téléconsultations psychiatriques sont en revanche programmées et assistées chez les résidents d'Ehpads.


Autres formes de téléconsultation programmée et assistée

La téléconsultation programmée et assistée chez les résidents des Ehpads, en premier et second recours, accompagnées par une équipe d'infirmier(e)s mobiles ou la téléconsultation programmée post passage aux urgences (https://thinktank-numeriquesante.org/webinaire/ce-quil-faut-retenir-du-webinaire-du-30-mai-2024-consacre-a-la-teleconsultation-programmee-en-ehpad-et-a-la-teleconsultation-non-programmee-dans-les-services-durgences/)

L'absence d'un médecin traitant chez un patient chronique peut conduire à de nouvelles formes de prise en charge par téléconsultation assistée.

Des IDEs témoignent du désarroi de certains patients chroniques qui découvrent, lors du départ en retraite de leur médecin traitant, que leur dossier médical ne peut être transféré à un autre médecin parce qu'il n'a pas été informatisé. Il est resté sous forme papier et doit être déposé auprès du CDOM.

Certaines mairies prennent l'initiative de numériser ces dossiers pour que le nouveau médecin recruté dans la commune (notamment salarié dans un centre de santé) puisse avoir un DPI de la patientèle de l'ancien médecin.

Malheureusement, toutes les mairies ne sont en mesure d'assurer ce service et le patient porteur de pathologies chroniques se retrouve sans dossier médical retraçant l'histoire de sa maladie et des traitements. Le renouvellement d'une ordonnance auprès d'un médecin de STC ou d'un autre médecin du territoire peut être difficile.

Les IDELs qui exercent en milieu rural connaissent ces situations qui ne sont pas exceptionnelles, notamment lorsque le médecin a exercé depuis le début des années 2000 dans une zone "blanche". Ces IDEL de territoires ruraux ont pris la mesure de cette potentielle perte de chance. Elles organisent dans leur cabinet des téléconsultations programmées et assistées où elles apportent au médecin téléconsultant ce qu'elles connaissent de l'histoire médicale de ce patient chronique. 


Le chainon manquant : la coordination des pratiques de télésanté au sein d'un territoire


Il est frappant d'entendre les professionnels de santé du terrain se plaindre d'un manque de moyens pour coordonner les parcours de soins hybrides, en particulier l'organisation des actes de télésanté. En l'absence de coordination, les actes de téléconsultations programmées et assistées sont difficiles à réaliser, car trop chronophages pour des IDELs qui veulent maintenir le niveau de leur revenu horaire.

Les IDELs citent l'excellente coordination régionale dans la prise en charge des patients atteints de plaies chroniques. Lorsqu'elles ont besoin d'une téléexpertise auprès d'un spécialiste hospitalier ou libéral de plaies chroniques, elles reçoivent de la coordination régionale un lien numérique qui leur permet d'être immédiatement en relation avec le médecin expert des plaies chroniques lorsqu'elles sont auprès de leur patient.

La coordination et l'organisation des actes de télésanté au sein d'un territoire pourraient être confiés aux CPTS qui sont de plus en plus investies dans de nouvelles organisations territoriales pour améliorer l'accès aux soins. De nombreux logiciels qui sont proposés aux CPTS pour coordonner le e-parcours disposent de la possibilité de réaliser des téléconsultations et téléexpertises (https://vimeo.com/1123218107)

Le développement de la téléconsultation programmée et assistée auprès des populations âgées, handicapées, vulnérables (les détenus des prisons) pourrait dépendre d'une meilleure coordination de la télésanté au sein d'un territoire assurée par les CPTS.


4 octobre 2025