Construisons ensemble la médecine du XXIème siècle
Les fondateurs du Think Tank ont cherché à faire mieux connaitre aux citoyens et aux patients, à l'ensemble des professionnels du numérique en santé, à toutes les professions de santé concernées, ainsi qu’aux autorités sanitaires et autres instances du monde de la santé, les innovations et réussites, en premier lieu organisationnelles et d’usages impliquant la télésanté et le numérique en santé dans le domaine des parcours de santé associant les soins distanciels et les soins présentiels au niveau d'un territoire de santé, et entrainant dans leur sillon des innovations sociales et économiques.
Nous pensons que ces parcours de santé « hybrides » bénéficient en premier lieu aux patients atteints de maladies chroniques, de plus en plus nombreux avec l'allongement de l'espérance de vie. Au-delà de ces innovations, l’enjeu est d’installer de nouvelles pratiques professionnelles en passant à l’échelle de notre système de santé, de manière fiable et durable. Cela représente une évolution essentielle de la médecine au 21ème siècle[1]. Les adhérents, qui ont rejoint le Think Tank en participant aux webinaires et en s’impliquant dans les groupes de travail, partagent cette vision dans l’évolution indispensable de la prise en charge et du suivi des patients[2].
Ainsi les premières préconisations que nous publions aujourd’hui résultent d’abord de l’intégration des expériences réussies sur le terrain (6 webinaires au cours du 1er semestre 2024) et des travaux de groupes de travail qui ont réfléchi au champ des possibles de la téléconsultation et à la formation des professionnels de santé aux pratiques de télésanté.
LE PARCOURS DE SANTÉ HYBRIDE.
1ère préconisation
Les parcours de soins alternant les soins distanciels et les soins présentiels caractérisent la médecine hybride du 21ème siècle[3]. C’est par l’alliance de la clinique et des technologies que l’organisation territoriale des soins garantira une meilleure performance dans la prise en charge des patients par une équipe de soins.
2ème préconisation
Cette médecine hybride doit reposer sur des organisations professionnelles innovantes fondées sur les compétences des différents professionnels constituant des équipes de soins de premier et de second recours[4] au sein des multiples structures des secteurs sanitaires et médico-sociaux pour une meilleure prise en charge globale et un pilotage des parcours fondé sur la coordination des équipes de soins :
3ème préconisation
Cette médecine hybride ne peut se mettre en place qu’avec des coopérations organisées entre les différents professionnels de santé sur un territoire de santé. L’évaluation des organisations professionnelles pour des soins distanciels doit montrer, par des études contrôlées et randomisées, leur non-infériorité par rapport aux soins présentiels.
Il est recommandé par la HAS[5] de faire participer les patients à ces évaluations en intégrant l’expérience organisationnelle telle que vécue par le patient, au cours des soins distanciels (PREMs pour Patient-Reported Expérience Measures), et ainsi que les résultats thérapeutiques obtenus par les nouvelles organisations distancielles (PROMs pour Patient-Reported Outcome Measures) [6] [7]
4ème préconisation
Les soins distanciels, en particulier les diverses formes de téléconsultation, doivent s’adapter au parcours de santé hybride du patient pour réussir à s’imposer comme un moyen essentiel d’assurer en toute sécurité et qualité la continuité des soins, notamment pour les patients atteints de maladies chroniques.[8] [9] [10]
5ème préconisation
A cet égard, la pratique des soins distanciels, avec toutes les formes de la télésanté (téléconsultation, téléexpertise, télésurveillance, télésoin), nécessite, afin de conserver leur qualité, l’usage de Mon Espace Santé (MES), notamment le Dossier Médical Partagé (DMP)[11]. Il permet en sécurité de compléter l’interrogatoire du patient et de tracer le compte rendu de l’acte réalisé et des prescriptions faites.[12] La disponibilité d’un dossier partagé entre les professionnels appelés à intervenir est fondamentale et son accessibilité autorisée par les patients doit être facilitée pour les médecins et autres professionnels de santé.
LA TÉLÉCONSULTATION, SON CHAMP DES POSSIBLES.
6ème préconisation
Les soins distanciels sont réalisables avec le consentement des patients préalablement informés des bénéfices[13] et des risques de cette nouvelle organisation rendue possible par les pratiques de la télésanté. De ce fait, la téléconsultation, sous ses différentes formes, est une modalité essentielle d’exécution du soin à distance en alternance avec la consultation en face à face qui caractérise le soin présentiel.
7ème préconisation
La téléconsultation est un acte majeur du parcours de soins hybride dont le recours ne peut être ni exclusif ni limité par un pourcentage imposé à l’activité des professionnels médicaux. Seuls lesdits professionnels, eu égard au besoin des patients atteints de maladies chroniques doivent être en mesure d’en déterminer la pertinence et la fréquence pour garantir l’efficience du parcours et la bonne coordination des soins.
8ème préconisation
Le champ des possibles d’une téléconsultation recouvre plusieurs situations dans un parcours de santé:
LA FORMATION DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ
9ème préconisation
Ce champ des possibles peut être illustré par un exemple parmi d’autres, celui de la relation patient-professionnels dans un parcours de soins de maladies chroniques. La pratique hybride ouvre une perspective : celle d’un passage (a) des rendez-vous en présentiel qui reposent aujourd’hui sur des fréquences préétablies avec le médecin généraliste, le spécialiste et les soignants à (b) une alternance de rendez-vous distanciels et présentiels selon l’évolution de l’état clinique et les besoins du patient s’appuyant sur un plan personnalisé de santé (PPS), que les soins distanciels et le self management soutiendront.
Il est recommandé que tout soignant souhaitant pratiquer une activité de télésanté, en particulier de téléconsultation, bénéficie d’une acculturation clinique et pratique. Cela relèvera, à terme, de la formation initiale dans les universités et instituts de la santé[19]. Il est impératif d’y inclure les parcours de santé hybrides dans le cursus des enseignements de spécialité, afin de l’aligner sur les autres types de pratiques, de tendre à la normaliser là où elle s’affiche aujourd’hui plutôt comme une exception.
Dès à présent, pour les professionnels en exercice, cela impose de mettre en place une formation de DPC[20] sur la base d’EPP s’appuyant sur des référentiels de nature comportementale, comme le sont les recommandations HAS, ainsi que des référentiels de la littérature scientifique tant pour le professionnel de santé que pour le patient.[21] Une attention majeure des organisations libérales comme hospitalières doit être sollicitée à cet effet et entrer dans le cadre de la certification périodique des compétences de tous les professionnels de santé.
10ème préconisation
L’acculturation des professionnels de santé à la télésanté et au numérique en santé reste une préoccupation majeure. Le socle de référentiel de formation à la médecine à distance est actuellement centré sur le numérique et mériterait un développement de la formation clinique et sémiologique afin que l’ensemble des praticiens médicaux et paramédicaux acquière une meilleure connaissance de la médecine à distance intégrant ses contraintes Les soins distanciels nécessitent également de connaître les enjeux juridiques en termes de responsabilité du professionnel, ainsi que l’impératif d’apprendre à créer un lien de confiance et d’empathie via un média.
EN CONCLUSION
Telles sont nos premières préconisations.
Elles sont rendues publiques pour qu’elles puissent être mises en œuvre par les Ministères de la Santé et du Numérique, les différents Agences de l’Etat en charge de ces sujets, la Caisse nationale d’Assurance maladie, la Caisse nationale pour la solidarité et l’autonomie (CNSA), les universités et les divers instituts en charge de la formation initiale et continue des professionnels de santé.
Nombre de nos préconisations nécessiteraient des décisions politiques pour activer les leviers nécessaires à un développement soutenu et pertinent des pratiques de télésanté.
Nous pouvons citer quelques exemples du champ des possibles :
Nous ne les avons pas toutes recensées ici, à la fois parce qu’elles découlent assez clairement des constats que le TT a fait, ensuite, parce que ces décisions ne pourront devenir efficientes qu’après un dialogue que nous appelons vivement de nos vœux avec toutes les parties prenantes sous l’impulsion du Ministère
D’autres préconisations seront ultérieurement publiées en 2025 et tiendront compte des observations et des réactions attendues, ainsi que des webinaires programmés par le Think Tank. [22]
Références
[1] https://telemedaction.org/think-tank/
[2] https://telemedaction.org/think-tank/devenir-membre-du-think-tank
[3] https://telemedaction.org/422021881/m-decine-hybride-au-21-me-si-cle
[4] https://telemedaction.org/423570493/451016221
[5] https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2021-07/rapport_panorama_proms_prems_2021.pdf
[6] https://telemedaction.org/422021881/452585514
[7] https://telemedaction.org/422021881/sr-aux-patients-en-tlm-quelle-m-thodologie
[8] https://telemedaction.org/think-tank/t-l-surveillance-de-l-insuffisance-cardiaque-exp-riences-pionni-res
[9] https://telemedaction.org/think-tank/webinaire-28-mars
[10] https://telemedaction.org/think-tank/webinaire-du-25-avril
[11] https://telemedaction.org/423570493/mes-santuaire-de-la-t-l-sant
[12] https://telemedaction.org/423570493/mes-santuaire-de-la-t-l-sant
[13] https://telemedaction.org/423570493/sant-et-empreinte-carbone
[14] https://telemedaction.org/think-tank/webinaire-25-janvier
[15]https://www.google.com/search?q=recommandation+Has+sur+les+lieux+t%C3%A9l%C3%A9consultation&rlz=1C1EJFA_enFR801FR802&oq=recommandation+Has+sur+les+lieux+t%C3%A9l%C3%A9consultation&gs_lcrp=EgZjaHJvbWUyBggAEEUYOTIHCAEQIRigATIHCAIQIRigAdIBCjI4OTAxajBqMTWoAgiwAgE&sourceid=chrome&ie=UTF-8
[16] https://telemedaction.org/437100423/lieux-et-environnement-d-une-tc-ou-t-l-soin
[17] https://telemedaction.org/think-tank/tlm-et-personnes-g-es
[18] https://telemedaction.org/think-tank/webinaire-du-30-mai
[19] https://telemedaction.org/think-tank/les-facult-s-de-m-decine-passent-la-vitesse-sup-rieure
[20] https://telemedaction.org/422016875/epp-en-t-l-sant
[21] https://telemedaction.org/422016875/acculturation-et-pratiques-professionnelles
[22] Les membres du comité de rédaction : Dre Marion Lagneau (doc.marion.lagneau@gmail.com), Mr Olivier Babinet (olivier.babinet@health-in-move.com), Mr Fabrice Huré (Fabrice.hure.35@gmail.com), Pre Lina Williatte (lina.williatte@icloud.com), Pr Thierry Moulin (tmoulin25@gmail.com), Dr Jacques Lucas (dr.lucas.jacques@gmail.com), Dr Pierre Simon (pierre.simon22@gmail.com)