Ce qu'il faut retenir du webinaire du 30 mai 2024 consacré à la téléconsultation programmée en Ehpad et à la téléconsultation non programmée dans les services d'urgences.


Comme nous l'avons souligné dans un billet récent consacré à l'état des lieux de la télémédecine en faveur des personnes âgées (https://telemedaction.org/think-tank/tlm-et-personnes-g-es), nous ne sommes pas encore parvenus en France à trouver le modèle médico-économique qui permette aux résidents des Ehpads, population très âgée qui cumule en moyenne 8 maladies chroniques au moment de leur admission dans la résidence, d'avoir l'accès à des soins que leur état de santé physique et mental justifierait. Au moins la moitié des résidents des Ehpads n'a plus de médecin traitant.

Le Think Tank Santé Numérique et Télésanté a invité les représentants de deux équipes qui sur le terrain essaient d'améliorer cette situation grâce à une organisation professionnelle innovante : l'expérimentation de la policlinique mobile de télémédecine initiée en 2017 par le Dr Laurent Schmoll, chirurgien ORL, dans le cadre de la startup TokTokDoc fondée en 2016, l'expérimentation Télescope ou téléconsultation post-urgences initiée en 2019 par les Drs Emmanuelle Chavda et Enrique Cordova, médecins urgentistes dans le service des urgences du GHICL (Groupement Hospitalier de l'Institut Catholique de Lille).

Le replay sur You Tube : https://youtu.be/AfxSdNBPKRI


L'expérience de la Policlinique mobile de télémédecine (TokTokDoc)


Notre vision

Nous amenons la prévention, le soin et le suivi médical au contact de toutes celles et ceux qui en sont éloignés. Nous raccourcissons le chemin du patient au médecin, pour les actes les plus simples comme les plus complexes, en assurant une médiation mobile, humaine et technologique.

Les problèmes

  • Plus de besoins d'une population de plus en plus âgée et dépendante, augmentation des ALD (affections de longue durée), situation dramatique de l'accès aux soins dans les établissements médico-sociaux et notamment EHPAD.
  • Moins de médecins avec une génération qui est en train de s’éteindre, et une nouvelle qui arrive à pas comptés (réduction du temps de travail médical, numerus apertus trop tardif). Le creux démographique existera au moins jusqu’en 2035.
  • Croissance des déserts médicaux dans la plupart des territoires. Le nombre en zones en sous-densité médicale a quasiment doublé en 4 ans.
  • Le tout-technologie n’est pas la réponse, le modèle de « téléconsultation autonome » seul devant un écran ou dans une cabine ne convient pas aux situations complexes, ni aux publics peu acculturé au numérique.
  • Risque d’intervention autonome d’un acteur type GAFAM, qui court-circuiterait la puissance publique sur un sujet qui fait partie de l’identité et des préoccupations des Français.
  • Sentiment fort du public qu'il existe une rupture de l’égalité devant le soin : rupture territoriale, sociale, démographique.

Notre solution

Notre modèle est égalitaire devant le soin. Pour tenir cette promesse, nous avons adopté une approche hybride associant la technologie et l’humain.

Nous intervenons au point de rencontre entre les patients et le système de soin. Nous proposons "clé en main" des téléconsultations et des téléexpertises à haute valeur ajoutée réalisées en présence d’une infirmière experte et avec des outils de diagnostic connectés permettant un large panel d’actes.

Cette solution est incarnée par la Policlinique mobile de télémédecine TokTokDoc, labellisée expérimentation article 51. Il s’agit d’un véritable établissement de santé « hors les murs », qui embarque des outils de prise en charge par télémédecine et une équipe d’infirmières mobiles expertes en télémédecine. À distance, des médecins spécialistes rémunérés à la vacation sont disponibles, ainsi qu’une équipe de coordination incluant secrétariat médical et fonctions supports.

Nous avons créé un « parcours de soins » complet, qui vient apporter physiquement aux établissements ou aux collectivités le renfort dont ils ont besoin.

Nous assurons ainsi :

  • Le dernier kilomètre du soin
  • Via un exercice pluriprofessionnel coordonné
  • Autour de la télésanté & d’une présence physique au chevet du patient
  • Avec un financement au parcours.

Pourquoi ici et maintenant

  • Un vivier exceptionnel de 700 000 infirmiers sur lequel s’appuyer (900 000 en 2040). C’est la profession de santé la plus dense, leur montée en compétence a commencé avec les IPA.
  • Une nouvelle génération de médecins arrive, plus jeune, ouverte à la coopération et au partage des tâches. Elle ouvre la porte à une décongestion d’un système centré sur la pratique libérale isolée.
  • La volonté politique est à l’œuvre : Ségur de la santé, Ma santé 2022, expérimentations article 51, France 2030, 5e branche, SAS...
  • La pandémie a accéléré de plusieurs années l’adoption et l’acceptabilité des innovations numériques et technologiques en santé.
  • L’opinion publique se fait pressante : la crise sanitaire a éclairé d’une lumière crue les limites de notre système de santé.

Policlinique Mobile

  • La Policlinique mobile est une organisation de soins distanciels innovante mise en place dans le cadre de l’Article 51 de la LFSS 2018, agréée par le ministère des Solidarités et de la Santé, autorisée par le Directeur Général de l’ARS Grand Est, financée par l’Assurance Maladie, supervisée par les CPAM 57, 67, 88.
  • 1370 patients bénéficiaires sur 17 établissements et 3 bassins de santé, 10 IDE de télémédecine + 18 spécialistes vacataires dans 11 spécialités.
  • Arrêt de la Polyclinique mobile fin novembre 2023,


Pour en savoir plus :




















Création de la Policlinique de Télémédecine Territoriale à compter de juin 2024 dans le périmètre identique du Grand Est afin de permettre aux patients de retrouver les soins temporairement suspendus. Financement par le FIR (Fonds d'Intervention Régionale)


Pour en savoir plus :























L'expérience de Télé-Scope ou téléconsultation post-urgences au GHICL


Pourquoi Télé-Scope ?

Contribuer à désencombrer le service des urgences, la surcharge étant source de tensions, de violences, de délais d'attente excessifs, de dégradation des conditions de travail, sources d'erreurs diagnostiques et/ou thérapeutiques. Il s'agit également de mieux maitriser les hospitalisations non pertinentes. Une téléconsultation possible 24h/24.


Pour quels patients ?

Certains patients CCMU (Classification Clinique des malades aux urgences) de niveau 2-3 qui nécessitent une réévaluation médicale.

Lorsqu'il existe une incertitude concernant l'évolution.

Il s'agit le plus souvent de patients qui nécessitent une hospitalisation de courte durée.

Les motifs cliniques dominants : une douleur non contrôlée avec une échelle > 3, une douleur d'étiologie indéterminée, une fièvre sans point d'appel, la surveillance d'une antibiothérapie.


Quelle plateforme de téléconsultation ?

Médaviz est une plateforme commerciale permettant de réaliser des appels audio ou video, d'adresser des ordonnances, de recevoir des documents.

Cette plateforme est en conformité avec la réglementation en vigueur (formulaire de consentement reposant sur une information claire de l'usage de la plateforme, formulaire de prise d'un rendez-vous de téléconsultation, présentation d'un tutoriel pour l'usage de la plateforme).


Lever des difficultés initiales

Méconnaissance de ce qu'est la téléconsultation chez plusieurs professionnels de santé.

Obtenir un consensus sur le projet, tant au sein de l'équipe des urgences que chez les médecins généralistes.

L'identification des patients à recruter pour l'étude.

L'arrivée de la pandémie Covid-19.


La thèse qui porte le projet Télé-Scope

Grille d'évaluation multidimensionnelle : MAST (Model for AsseSsment of Telemedicine)

Étude prospective, comparative, sur deux périodes de 4 mois : phase contrôle en 2019 (janvier à mai), phase test en 2020 (février à septembre). Évaluation du score NEDOCS (score composite calculé chaque heure pour donner le niveau de tension aux urgences). il mesure l'encombrement des urgences avant et après la mise en place du dispositif, allant du niveau "normal" à "dangereusement surchargé".


Les objectifs initiaux :

Pour le patient : améliorer l'efficacité diagnostique, diminuer les hospitalisations non pertinentes, diminuer le temps de prise en charge aux urgences, faciliter les hospitalisations directes, diminuer les complications d'hospitalisation aux urgences (infection nosocomiale, chutes, agitation), augmenter la confiance du patient dans l'institution.

Pour le service : diminuer l'encombrement du service d'urgences, optimiser les flux de patients avec sorties rapides, optimiser l'orientation vers la bonne filière de soins, augmenter le nombre de lits disponibles libérés par les hospitalisations non pertinentes, diminuer les hébergements inappropriés dans d'autres services, diminuer les transferts vers d'autres hôpitaux, diminuer le nombre de procédures judiciaires à l'encontre du service.

Pour la collectivité : diminution des coûts dus aux hospitalisations évitables, à la répétition d'examens complémentaires, aux transports sanitaires, aux complications des hospitalisations.

Pour les médecins de ville : soulager leur travail en évitant des re-consultations évitables.


Nos premiers résultats : ebook 2022 ---> (https://www.medaviz.com/la-telemedecine-a-lhopital-retour-dexperience-du-ghicl/)

Les résultats concernant l'encombrement et le score NEDOCS sont très positifs. La téléconsultation permet d'augmenter de 160h la tension "normal" du service des urgences, de diminuer de 129h la période "occupé" et de 19h la période "surchargé".













Nos résultats en 2023-24












Pour en savoir plus sur l'impact réel de cette expérimentation : Télé-Scope sera testé dans le cadre d'un PREMs.












3 juin 2024